Dans la Villa Pérochon, voyage intérieur en milieu carcéral avec Klavdij Sluban, jusqu’au 30 mai.
Si vous avez loupé l’article dans le quotidien » LA NOUVELLE REPUBLIQUE » le voici :
Avant l’arrivée des jeunes photographes internationaux, les 21 èmes Rencontres de Niort s’ouvrent avec trois expositions. Dont celle de l’invité d’honneur, Klavdij Sluban, à la Villa Pérochon. Sublime.
Cela transpire l’intelligence par tous les pores. A la Villa Pérochon, l’exposition consacrée à Klavdij Sluban, en ouverture aux Rencontres de la jeune photographie internationale, marque une entrée fracassante dans cette 21eédition. Le photographe, né à Paris et qui a vécu son enfance en ex-Yougoslavie, à Livold (Slovénie), y présente deux parties de son œuvre.
« J’ai l’esprit cartésien et l’âme slave, répond Klavdij Sluban quand on évoque cette double identité. Quand les jeunes photographes me demandent ce qu’il faut photographier, sur quel projet partir, je leur conseille d’abord de définir leurs obsessions. Si on y parvient, on a chacun en nous assez de matière de création et ce sera le meilleur moyen de ne pas être dans la répétition d’un autre. »
Côté jardins, sur dix-huit bâches géantes, dehors c’est logiquement une invitation vers l’extérieur, en errance lente entre l’Est et notre Ouest, entre chaque bout des racines de Klavdij Sluban. Tout de suite, on est happé par sa double appartenance « entre tradition humaniste française et écriture photographique extrêmement contemporaine », selon Patrick Delat, directeur des lieux, à qui le photographe a laissé carte blanche pour la scénographie.
Avant même de pénétrer dans les murs du Centre d’art contemporain photographique de Niort, la densité des noirs, la lumière, la composition hypnotisent déjà le visiteur. Comme ces détails qui font toute la différence par leur contraste, ce chapeau blanc sur le quai d’une gare ou ces trois tuyaux dans un désert, caressant la ligne de fuite d’une route vers une montagne enrobée d’un horizon laiteux. Le grain est superbe.
Cartier-Bresson?: « ?L’émotion vous étreint…? »
Passées ces « Transsibériades » et leur invitation au nomadisme, l’intérieur sera carcéral. Tellement bien pensé?! Dans la Villa Pérochon, c’est donc le choc des murs avec vingt années de cycle photographique, de 1995 à 2015, en prison. Du noir et blanc, toujours. « Est-ce qu’il existe d’autres manières de photographier?? », demande en souriant Klavdij Sluban, qui, entre la profondeur de ses noirs et ses élans lumineux, joue comme un funambule fou sur les nuances de gris.
Photographiées en Moldavie, en Russie, en Lettonie… ou à Fleury-Mérogis, ces « Parenthèses », ces scènes de vie et leurs tempêtes sous des crânes rasés, nous sidèrent d’emblée par leur réflexion. Aucune légende sous les photos, c’est un parti pris?: mais alors, où est la prison russe, où est la geôle française?? Oui, il y a quelque chose d’universel dans cette idée de l’enfermement et d’une certaine violence de l’humanité.
Cette écriture universelle a même ému Henri Cartier-Bresson – et pour cause – dont un message trône à l’entrée de l’exposition. Avec ces trois maîtres mots d’HCB, picorés dans sa lettre du 20 avril 1998, qui résument on ne peut mieux ce sublime instant suspendu où le temps s’étire?: « L’émotion vous étreint ». Eh, oui, ça se passe à Niort et c’est à lire (plusieurs fois) jusqu’au 30 mai.
repères
> Exposition des photographes en résidence de création. Au pavillon Grappelli (56, rue Saint-Jean), du samedi 7 mars au samedi 30 mai (du mercredi au samedi, de 13?h?30 à 18?h?30) en deux temps?: du 7 mars au 17 avril l’exposition des œuvres des jeunes photographes présentées au jury pour leur sélection?; puis du 18 avril au 30 mai, leurs travaux réalisés en résidence à Niort. Les jeunes photographes?: Min Chen (Chine)?; David Fathi (France)?; Joseph Gallix (France)?; Ida Jakobs (France)?; Truth Leem (Corée du Sud)?; Juliette McCawley (Trinité-et-Tobago)?; Emanuela Meloni (Italie)?; Bostjan Pucelj (Slovénie).
> Exposition Charlie Jouvet. « Dire après Phnom Penh », belvédère du Moulin du Roc (boulevard Main), du samedi 7 mars au samedi 30 mai, du mercredi au samedi, de 13?h?30 à 18?h?30.
> Exposition Mélania Avanzato. « Fragment/Impressions du monde sensible », au conseil général des Deux-Sèvres (mail Lucie-Aubrac), du lundi 23 mars au samedi 30 mai.
> Exposition Sabine Delcourt. « Paysages habités », au Pilori (place Mathurin-Berthomé), du mardi 24 mars au samedi 25 avril, du mardi au samedi, de 13?h à 19?h?30.
> Exposition Virginie Plauchut. « Sans preuve et sans cadavre », à La Librairie des Halles (1, bis rue de l’Hôtel-de-Ville), du vendredi 3 au jeudi 30 avril, le lundi, de 14?h?30 à 19?h et du mardi au samedi, de 10?h à 19?h.
> Exposition Marlous Van Der Sloot. « Le corps vécu », à la galerie Atelier du cadre, 62 bis, avenue de Limoges, du vendredi 3 avril au samedi 30 mai, du mercredi au samedi, de 14?h à 18?h?30.
> Exposition « Le Temps de voir ». 15 ans d’actions d’éducation à l’image menées par l’association Pour l’instant en milieu scolaire, au conseil général des Deux-Sèvres (hall Ernest-Pérochon, mail Lucie-Aubrac) et au centre Du-Guesclin (bâtiment C, place Chanzy à Niort), du vendredi 3 au vendredi 24 avril.
> Table ronde. La pratique de la photographie comme moyen d’éducation à l’image, la rencontre avec des artistes comme moyen d’ouverture au monde, samedi 18 avril, à 15?h?30, espace Du-Guesclin à Niort.
> Workshops. Deux stages (payants) sont organisés pendant le festival, du 20 au 22 mars avec Olivier Culmann (« Développez une écriture photographique personnelle ») et le 4 avril avec Charlie Jouvet (« Colorimétrie et tirage numérique d’exposition »). Renseignements et inscriptions sur le site internet de la Villa Pérochon (pourlinstant.com), rubrique « Stages ».
Tél. 05.49.24.58.18.
Entrées gratuites.